La Mouette
La mouette est un petit albatros. Réduisons à proportion les alexandrins de L’Albatros en hexasyllabes. Pour contraintes voisines déjà existantes, "la redondance chez Phane Armé" et diverses haïkaïsations oulipiennes...
Pour le fun les marins attrapent des mouettes, ces planeurs pèlerins dessus les goélettes. Aussitôt sur le pont, les as de la voltige atterrent tout rebond ; leur plumage se fige. Qui dominait le flot est frappé d’impotence ! L’un navre son jabot, l’autre boite sa danse. L’oulipote est ainsi : englouti dans sa page d’oiseau proie aux lazzi sans l’azur ni la plage.
La même réduction appliquée à Demain, dès l’aube... poème de deuil de Victor Hugo :
Sitôt l’aurore claire, exauçant ton affût je traverse la terre vers toi — là mon salut. Replié sur mon âme, aveugle et sourd à tout, je m’avance, ectoplasme qu’un clair-obscur dissout. Qu’importent l’agonie du jour, le port, l’esquif : ta stèle soit bénie du bleu rameau d’un if.
Le schéma de rimes du Sonnet d’Arvers diffère entre les deux quatrains : A-B-A-B / B-A-A-B.
Ci-dessous paraphrase réduite en hexasyllabes.
Mon for couve contrit l’ardeur d’un coup de foudre ; déchirement non-dit qu’elle ne peut recoudre. Transparent me résoudre au parage fortuit à la fin me réduit ignoré, pauvre en outre. Son caractère accort n’entend mon souffle : accord éperdu sur sa voie. Sa vertu ne connaît assez de ce sonnet pour qu’elle y s’entrevoie.
Une digression. Vu son nom, c’est tentant de disposer Arvers à revers. Ci-après les mots ou les idées défileront en ordre inverse de l’original. Un précédent s’intitulait El Dochadides.
Arvers à revers — Elle ne comprend pas, cette Dame, l’atour qui pare le sonnet lu de sa voix bien claire, fidèlement pieuse à son devoir austère : elle-même ! par où murmurait mon amour. Car elle n’entendit — en chemin trop distraite par ses tendres douceurs d’apanage divin — rien que j’espérais d’elle, ayant soldé mon vain bannissement terrestre aux confins de retraite. Solitaire je fus, près d’elle à chaque instant sans qu’elle remarquât mon passage attristant. Elle ignora toujours l’exil qui me condamne. Mais d’avoir mis sous clé l’incurable pathos, j’ai cru juste un moment en l’éternel éros qui crypta mon destin, secrètement mon âme.
Robert Rapilly [in Sonnets],
mardi 12 octobre 2021 à 14:40
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Commentaires
1. Le mercredi 20 octobre 2021 à 15:52, par U.N. None