Le blogue de Robert Rapilly

Elvis décompresley

.

Alignons une séquence de phonèmes :
r u l u l t i m i d r o k r a f t ,
puis intercalons-y des E toniques :
ErEu l u lEt i m i dEr o kEr a f tE

Telle opération a pour double effet
de nous rappeler qu’un infime cours
d’eau a charrié une pâte de robuste
papier dont le froissement enchanté
évoque un cri de chouette répondant
à Elvis Presley rougissant & ulcéré
et de décompresser l’hexasyllabe en
dodécasyllabe de précise prosodie :

Ru, l’ultime hydro-kraft
heureux hulule : timide rocker aphteux !



Un premier vers = 16 syllabes
sera phonétiquement compressé
en 10 syllabes par extraction
de 6 E métriquement comptés :

pEl u fEr é jEa l e t é s è tEo tEr u chEé l é
p l u f r é j a l é t é s è t o t r u ch é l é

Peu lu ferai-je haleter cette hotte-ruche hélée ?
Plus frais j’allaitai cette autruche ailée.



Euler peureux fera penser Kant : « Où feu lèche,
sévit grand froid, colle un slip laid ! »
C’est vigueur en feu Roi qu’au linceul y pelait
l’air preux frappant sécante ou flèche.

La Mouette

La mouette est un petit albatros. Réduisons à proportion les alexandrins de L’Albatros en hexasyllabes. Pour contraintes voisines déjà existantes, "la redondance chez Phane Armé" et diverses haïkaïsations oulipiennes...

Pour le fun les marins
attrapent des mouettes,
ces planeurs pèlerins
dessus les goélettes.

Aussitôt sur le pont,
les as de la voltige
atterrent tout rebond ;
leur plumage se fige.

Qui dominait le flot
est frappé d’impotence !
L’un navre son jabot,
l’autre boite sa danse.

L’oulipote est ainsi :
englouti dans sa page
d’oiseau proie aux lazzi
sans l’azur ni la plage.


La même réduction appliquée à Demain, dès l’aube... poème de deuil de Victor Hugo :

Sitôt l’aurore claire,
exauçant ton affût
je traverse la terre 
vers toi — là mon salut.

Replié sur mon âme,
aveugle et sourd à tout,
je m’avance, ectoplasme
qu’un clair-obscur dissout.

Qu’importent l’agonie
du jour, le port, l’esquif :
ta stèle soit bénie
du bleu rameau d’un if.



Le schéma de rimes du Sonnet d’Arvers diffère entre les deux quatrains : A-B-A-B / B-A-A-B.
Ci-dessous paraphrase réduite en hexasyllabes.

Mon for couve contrit
l’ardeur d’un coup de foudre ;
déchirement non-dit
qu’elle ne peut recoudre.

Transparent me résoudre
au parage fortuit
à la fin me réduit
ignoré, pauvre en outre.

Son caractère accort
n’entend mon souffle : accord
éperdu sur sa voie.

Sa vertu ne connaît
assez de ce sonnet
pour qu’elle y s’entrevoie.

Une digression. Vu son nom, c’est tentant de disposer Arvers à revers. Ci-après les mots ou les idées défileront en ordre inverse de l’original. Un précédent s’intitulait El Dochadides.

Arvers à revers —

Elle ne comprend pas, cette Dame, l’atour
qui pare le sonnet lu de sa voix bien claire,
fidèlement pieuse à son devoir austère :
elle-même ! par où murmurait mon amour.

Car elle n’entendit — en chemin trop distraite
par ses tendres douceurs d’apanage divin —
rien que j’espérais d’elle, ayant soldé mon vain
bannissement terrestre aux confins de retraite.

Solitaire je fus, près d’elle à chaque instant
sans qu’elle remarquât mon passage attristant.
Elle ignora toujours l’exil qui me condamne.

Mais d’avoir mis sous clé l’incurable pathos,
j’ai cru juste un moment en l’éternel éros
qui crypta mon destin, secrètement mon âme.

Archives - octobre 2021

Sélectionner une date

octobre 2021
« 12345678910111213141516171819202122232425262728293031 »

Les cases à fond coloré signalent les dates de parution des billets. Les flèches permettent de se déplacer au mois suivant ou précédent.