Le blogue de Robert Rapilly

jeudi 22 février 2007

jeudi 22 février 2007

El Desdichadog

Adios panthéons du monde ? or
Glapi du tombeau sous Cassandre
Un soupir a rougi la cendre
Ténébreuse volute d'or

Aboli parèdre il s'endor-
-mira dans l’esquif palissandre
Loin sur l'Achéron à descendre
Sait-on à quoi rêve Médor

Traverse mes soupirs ô source
Modulant ma nuit de ta course
Je suis la comète sans feu

Se constelle la trajectoire
Où nage consolé son vœu
Courbe du chien bissant victoire

Rap de Chantilly


Un froid et ténébreux Silence dort à l’ombre,
Charon m’appelle à soi, je suis désespéré.
Haut d’une vieille Tour mélancolique et sombre,
Tel est, grave et pesant, un Amant désolé.

J’ai des luths les plus doux goûté la Mélodie,
Les flots de la Vendange écument au pressoir,
Je vois en gémissant la Maison de Sylvie
Aussi souvent qu’Amour : Soleil devenu noir.

Froides nuits du Tombeau... J’ois Charon qui m’appelle,
Et la rougeur paraît de dire à cette Belle
Où le Flambeau du jour n’osa jamais venir !...

Ici murmureront les eaux - Dryade approche.
L’effroi de l’Achéron m’apporte le Soupir,
Ta bouche n’est qu’aux cris, au creux de cette roche !



À comparer au Desdichado de Nerval :

Je suis le Ténébreux, – le Veuf, – l’Inconsolé,
Le Prince d’Aquitaine à la Tour abolie :
Ma seule Étoile est morte, – et mon luth constellé
Porte le Soleil noir de la Mélancolie.

Dans la nuit du Tombeau, Toi qui m’as consolé,
Rends-moi le Pausilippe et la mer d’Italie,
La fleur qui plaisait tant à mon cœur désolé,
Et la treille où le Pampre à la Rose s’allie.

Suis-je Amour ou Phœbus ?... Lusignan ou Biron ?
Mon front est rouge encor du baiser de la Reine ;
J'ai rêvé dans la Grotte où nage la syrène...

Et j'ai deux fois vainqueur traversé l'Achéron :
Modulant tour à tour sur la lyre d’Orphée
Les soupirs de la Sainte et les cris de la Fée.

De la « vieille tour » à la « Dryade » (Eurydice était dryade) en passant par le « Soleil noir », ce « Rap de Chantilly » compile des indices d'une lecture par Gérard de Nerval de Théophile de Viau, antérieure à l'écriture du « Desdichado ». Sauf quelques majuscules nervaliennes, il s'agit d'un centon puisé exclusivement et sans rajout dans Viau, surtout les 2 odes « Un corbeau devant moi croasse » & « Satire première ».
Nerval a écrit :
« Je ne voyage jamais dans ces contrées sans me faire accompagner d'un ami, que j'appellerai, de son petit nom, Sylvain. C'est un nom très commun dans cette province, - le féminin est le gracieux nom de Sylvie, - illustré par un bouquet de bois de Chantilly, dans lequel allait rêver si souvent le poète Théophile de Viau. » (Angélique - 10e lettre)
« (...) Théophile de Viau, dont vous avez décrit les amours panthéistes, - par le chemin ombragé de l'Allée de Sylvie. » (Petits châteaux de Bohême)

Retenir du « Satyre » de Hugo :

Sylvain du Ptyx que l'homme appelle Janicule,
Qui jouait de la flûte au fond du crépuscule

des « Châtiments » :

Je suis le ténébreux par qui tout dégénère.
Sur mon autre côté lancez l'autre tonnerre

et de « Booz endormi » :

Je suis veuf, je suis seul, et sur moi le soir tombe,
Et je courbe, ô mon Dieu ! mon âme vers la tombe

Noce


À la brise avec maint mouchoir
S'abolit une onde dentelle
Qu'absence de lit éternelle
Aux baumes du temps laisse choir

Acclamez morsure à surseoir
Jusqu’à sa lèvre - muette aile -
L'unanime pourpre dont elle
Consomme l'abandon du soir

Le blanc vol quand on se marie
Frôle un regard qu’en rêverie
Atteste l'endroit nommé loin

Ce lucide contour est trouble
Lorsque y plonge horizon témoin
Du vent le vertige son double



(fragments d'octosyllabes de Stéphane Mallarmé)

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