Inoubliable atelier de Ian Monk auprès d’une classe de seconde, lycée Pasteur à Lille. Il s'adresse à une assemblée bigarrée de jeunes gens plus ou moins punks, gothiques ou rangés des vélos. La consigne tient en peu de mots : écrivez un autoportrait en forme de morale élémentaire. La lecture sera poignante, chaque élève gratifié du regard surpris et bienveillant de ses condisciples, Ian nous invitant à applaudir. Quelques semaines plus tard l’enseignante reviendra vers lui. Elle n’a jamais connu de classe aussi soudée. Rien de facile a priori cependant, mais une préparation méticuleuse, une extrême délicatesse de la parole et du geste, la conscience que l’écriture ici touche à la fragilité adolescente de récits de vies. Et Ian animateur de l’atelier n’élude pas les cicatrices de son propre autoportrait, qu'il lit en premier pour exemple, membre parmi les autres d’une commune poétique.

Quelque chose de fatalité britannique, j’ai souvent perçu une résonance de Dylan Thomas en Ian, "Plouk Town" répondant à "Portrait of the artist as a young dog". D'où, ci-après, une villanelle...

             

N’y sombre pas si douce soit la nuit
l’âge irradie il s’insurge du terme
enrage rage à fixer ce qui luit

L’usage — quoi — cède l’ombre au dépit
mais quelle allure et quel éclair du verbe
t’ont vu passer sans frousse dans la nuit

Homme de bien l’ultime souffle bruit
de Fives grise à Laugharne anse verte
enrage rage embrase ce qui luit

Tiens aujourd’hui le soleil il s’enfuit
puis le bistrot singe au néon sa geste
un virtuose œuvre eh ! billard la nuit

Delà silence où la noirceur instruit
la balistique en ton œil étincelle
enrage rage à brandir ce qui luit

Et toi Ian Monk loin d’où rien ne s’ensuit
bénis ou non nos larmes ma prière
surtout ne sombre asservi dans la nuit
enrage assez que passe la lumière