Les Jardins d'Antoine-Marin Lemierre
Repli frileux au cœur des désordres politiques ? On fait souvent constat du sommeil de la poésie française au XVIIIe siècle. Fondé ou non, le reproche mérite réparation. Cueillons 10 vers aux « Jardins » d'Antoine-Marin Lemierre : y retouchant à peine, quel poème un peu moderne récrire ?
1 - Version originale :
J'aime la profondeur des antiques forêts, La vieillesse robuste et les pompeux sommets Des chênes dont, sans nous, la nature et les âges Si haut sur notre tête ont cintré les feuillages. On respire en ces bois sombres, majestueux, Je ne sais quoi d'auguste et de religieux : C'est sans doute l'aspect de ces lieux de mystère, C'est leur profond silence et leur paix solitaire Qui fit croire longtemps chez les peuples gaulois Que les dieux ne parlaient que dans le fond des bois. (...)
2 - Fatrasie en permutant des mots :
J'aime l'antiquité des pompeuses forêts, la vieille robustesse et les profonds sommets dont des aspects sans lieu, les chênes et les âges, si haut sur la nature ont doute de feuillages. Bois sombres, je ne sais quoi des Majestueux et d'Auguste on respire ; et de religieux. C'est silence longtemps et peuple solitaire ; c'est le cintre profond de ces paix de mystère qui fit croire sans nous, chez les têtes de bois, que les dieux ne parlaient, dans le fond, que gaulois.
3 - Dizain symboliste en permutant des hémistiches :
Des chênes dont sans nous sombres majestueux Si haut sur notre tête et de religieux On respire en ces bois la nature et les âges De ces lieux de mystère ont cintré les feuillages C'est sans doute l'aspect des antiques forêts C'est leur profond silence et les pompeux sommets Que les dieux ne parlaient je ne sais quoi d'auguste Et leur paix solitaire à vieillesse robuste Qui fit croire longtemps que dans le fond des bois J'aime la profondeur chez les peuples gaulois
4 - Renga par caviardage ; 5/7/5 - 7/7 - 5/7/5 - 7/7 syllabes prélevées aux vers successifs :
Antiques forêts La vieillesse et les sommets Les chênes sans nous Haut ont cintré les feuillages On respire en ces bois sombres Je sais quoi d'auguste Sans doute aspect de ces lieux Leur profond silence Croire longtemps chez les peuples Les dieux dans le fond des bois
5 - El Jardinchado :
J'aime le soleil noir des veufs inconsolés, l'Aquitaine robuste et les rouges sommets des tombeaux dont, sans nous, l'Achéron et les âges sur la grotte si haut ont porté les feuillages. On module en ces bois vainqueurs et ténébreux je ne sais quoi de lyre et de religieux... Suis-je profond silence ou la fleur solitaire ? C'est sans doute la treille en un luth de mystère qui fit rêver encor chez les peuples, deux fois, que ne criât la sainte, au fond, qu'amour gaulois !
Robert Rapilly [in Vrac],
vendredi 19 décembre 2008 à 01:26
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Commentaires
1. Le lundi 29 décembre 2008 à 23:01, par Patrick Simon